Professions libérales en SEL : la nouvelle imposition dès 2025

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Architectes, médecins, avocats, pharmaciens… Les professions libérales sont nombreuses à exercer en SEL (société d’exercice libéral). Et pour cause : cette forme permet de concilier liberté d’exercice, structuration juridique solide et optimisation fiscale. En France, plus de 1,7 million d’entreprises libérales sont concernées – dont une part croissante choisit la SEL à l’IS pour s’organiser.

Mais à partir de l’imposition des revenus 2024 (déclaration 2025), tout change. Une décision du Conseil d’État est venue balayer la doctrine fiscale en vigueur, imposant une nouvelle distinction : celle entre rémunération du mandat social et rémunération de l’activité libérale. Une subtilité ? Pas vraiment. Ce changement bouleverse la manière dont les associés seront imposés, déclarés, et parfois même cotisés.

Si vous êtes associé d’une SEL – ou si vous accompagnez ces structures –, il est essentiel de comprendre :

  • ce que cette réforme implique concrètement ;
  • comment distinguer les deux types de rémunérations ;
  • quelles décisions stratégiques prendre pour ne pas subir ce virage fiscal.

Dans cet article, on vous explique tout simplement, exemples à l’appui.

Pourquoi ce changement fiscal ?

Tout part d’un revirement jurisprudentiel, suivi d’une actualisation de la doctrine administrative. Jusqu’à récemment, les rémunérations perçues par les associés de SEL à l’impôt sur les sociétés (IS) étaient majoritairement traitées comme des traitements et salaires ou des revenus de l’article 62 du CGI. L’administration considérait qu’en l’absence de clientèle personnelle, l’associé n’exerçait pas une activité indépendante, et devait donc être fiscalisé comme un salarié, même en l’absence de lien de subordination.

Mais cette position a été progressivement remise en question par plusieurs décisions du Conseil d’État. En particulier, la haute juridiction a jugé que l’absence de clientèle personnelle ne suffisait pas à caractériser un lien de subordination. Résultat : les revenus issus de l’activité libérale exercée au sein de la SEL pouvaient, sous certaines conditions, relever des bénéfices non commerciaux (BNC).

C’est cette logique que l’administration fiscale a intégrée dans sa doctrine à partir de 2022, avec application effective à compter de l’imposition des revenus 2024 (déclarés en 2025). Le Conseil national des barreaux a tenté de s’y opposer, mais le recours n’a abouti qu’à une annulation partielle de certaines précisions, sans remettre en cause le principe général.

Aujourd’hui, les associés de SEL doivent impérativement opérer une distinction claire entre :

  • la rémunération liée à leur mandat de direction (imposable dans la catégorie des salaires ou de l’article 62) ;
  • et celle perçue pour l’exercice de leur activité technique ou libérale (imposable en BNC, sauf lien de subordination).
Professions libérales en SEL : la nouvelle imposition dès 2025

Une SEL, c’est quoi au juste ?

Une SEL, ou société d’exercice libéral, est une structure juridique créée pour permettre aux professions libérales réglementées d’exercer leur activité sous forme de société. C’est une alternative à l’exercice individuel ou en société de moyens (SCM), qui offre plus de souplesse et une véritable personnalité morale.

Il existe plusieurs formes de SEL, selon le type de société choisi :

  • SELARL : société d’exercice libéral à responsabilité limitée (équivalent d’une SARL),
  • SELAS : société d’exercice libéral par actions simplifiée,
  • SELAFA : société d’exercice libéral à forme anonyme,
  • SELCA : société d’exercice libéral en commandite par actions.

Toutes ces structures peuvent opter pour l’impôt sur les sociétés (IS), ce qui leur permet d’optimiser la gestion de la rémunération des associés, de lisser la fiscalité, et de renforcer la capacité d’investissement.

Pourquoi autant de professionnels choisissent-ils cette voie ? Pour au moins trois raisons :

  1. Séparation du patrimoine : la responsabilité est limitée au montant des apports.
  2. Souplesse de gestion : la répartition des revenus peut être ajustée selon les fonctions exercées.
  3. Accès à des outils d’optimisation fiscale : notamment la possibilité de lisser les revenus, différer l’imposition ou déduire certaines charges.

Mais qui dit structure sociétaire dit aussi double casquette pour les associés : dirigeants et professionnels techniques. Et c’est précisément cette dualité qui est au cœur du nouveau régime fiscal.

Mandat social vs activité libérale : la distinction cruciale

Le cœur du nouveau régime repose sur une distinction fondamentale : celle entre les fonctions de mandataire social et l’activité libérale exercée au sein de la SEL. Cette séparation, longtemps floue dans la pratique, devient aujourd’hui incontournable pour déterminer la bonne imposition des revenus.

Le mandat social : une fonction de direction

Le mandat social correspond aux missions de gestion et de représentation de la société. Il s’agit, par exemple :

  • de convoquer les assemblées générales,
  • de représenter la société vis-à-vis des tiers,
  • de signer les contrats engageant la SEL,
  • ou encore de prendre des décisions stratégiques (changement de siège, modification statutaire…).

Les rémunérations perçues pour ces fonctions relèvent :

  • soit des traitements et salaires,
  • soit de l’article 62 du CGI, pour les gérants majoritaires de SELARL ou les gérants de SELCA.

L’activité libérale : le cœur du métier

À côté de ce rôle de dirigeant, l’associé exerce une activité technique : il soigne, défend, conseille, rédige, opère… Cette activité, lorsqu’elle est exercée sans lien de subordination à l’égard de la SEL, est désormais imposée dans la catégorie des bénéfices non commerciaux (BNC).

Un point important : l’absence de clientèle personnelle ne suffit plus à requalifier cette activité en salariat. Ce qui compte, c’est l’autonomie dans l’organisation du travail. Autrement dit, si l’associé fixe lui-même ses horaires, choisit ses dossiers, et conserve une indépendance technique, ses revenus sont imposables en BNC.

Un exemple concret

Prenons un avocat associé dans une SELAS. Il préside la société (mandat social) et exerce aussi des missions juridiques auprès des clients (activité libérale).

  • Sa rémunération pour le rôle de président sera imposée comme salaire.
  • Ses honoraires pour les prestations juridiques seront imposés en BNC.

Cette distinction devient obligatoire à partir des revenus 2024. Elle conditionne à la fois l’imposition, mais aussi les cotisations sociales, les déclarations, et les choix de régime (micro-BNC ou déclaration contrôlée).

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Ce qui change pour l’imposition des revenus 2024

À partir des revenus perçus en 2024, une nouvelle doctrine s’applique aux associés de SEL à l’IS. L’administration fiscale abandonne l’approche globalisante pour adopter une logique duale, fondée sur la nature exacte des fonctions exercées.

Avant vs Après : ce qui évolue

Avant 2024À partir des revenus 2024
Rémunération souvent intégralement imposée en traitements et salaires (ou art. 62)Distinction obligatoire entre mandat social et activité libérale
L’absence de clientèle personnelle suffisait à justifier le régime salariéL’absence de lien de subordination devient le critère déterminant
Revenus déclarés via la 2042 classiqueRevenus techniques imposés en BNC → déclaration 2035 ou 2042 C PRO

Quelles conséquences concrètes ?

  • Mandat social : les rémunérations liées au rôle de dirigeant restent imposables dans la catégorie des traitements et salaires (cases 1AJ, 1BJ…) ou de l’article 62 (cases 1GB, 1HB). L’abattement de 10 % ou les frais réels s’appliquent.
  • Activité libérale : les rémunérations techniques (consultations, soins, prestations) doivent être déclarées :
    • en BNC, si absence de lien de subordination → déclaration 2035 ou 2042 C PRO (micro-BNC),
    • en traitements et salaires, en cas de lien de subordination avéré.

La jurisprudence comme fondement

Ce revirement s’appuie sur deux décisions clés du Conseil d’État :

  • CE 16 octobre 2013, n° 339822 : un avocat sans clientèle propre n’est pas automatiquement salarié s’il n’a pas de lien de subordination.
  • CE 8 décembre 2017, n° 409429 : un président de SELAS peut cumuler mandat social et activité indépendante relevant des BNC.

L’administration s’est alignée sur cette jurisprudence et l’a étendue à toutes les formes de SEL à l’IS. Le rescrit BOFiP-BNC-000136 du 24 avril 2024 vient préciser les modalités pratiques de mise en œuvre, notamment en matière de seuils pour le micro-BNC et de charges déductibles.

Quels impacts pour les associés ?

Ce changement de doctrine ne se limite pas à une case différente sur la déclaration d’impôt. Il modifie en profondeur le traitement fiscal, social et même stratégique des rémunérations perçues par les associés. Voici les principaux enjeux à anticiper.

1. Impacts fiscaux : une nouvelle organisation déclarative

  • Revenus BNC : ils nécessitent une comptabilité distincte, la tenue d’un livre-journal, et une déclaration 2035 si vous relevez du régime réel.
  • Micro-BNC : possible si les conditions de seuil sont remplies (77 700 € en 2024), mais attention aux modalités particulières pour 2024 (prise en compte des revenus 2022 et 2023 à titre de référence).
  • Déduction des charges : plus large qu’en salaires. Les cotisations sociales obligatoires, frais de transport domicile-travail et contrats Madelin peuvent être déduits.

2. Impacts sociaux : cotisations et couverture

  • Les revenus BNC sont soumis aux cotisations sociales des indépendants (URSSAF – SSI), ce qui modifie la base et le calendrier des appels de cotisations.
  • Les régimes obligatoires de retraite (CIPAV, CARCDSF…) restent les mêmes, mais la base de calcul peut évoluer si une part de la rémunération passe en BNC.
  • La couverture sociale change : moins protectrice en BNC, sauf si le professionnel complète par une prévoyance privée (souvent via Madelin).

3. Impacts stratégiques : arbitrages à prévoir

  • Optimisation fiscale : certains associés y verront une opportunité de déduction plus fine de leurs frais professionnels.
  • Structuration interne : il devient stratégique de bien formaliser les tâches correspondant au mandat social vs à l’activité technique.
  • Choix de rémunération : selon les taux marginaux d’imposition et les cotisations sociales, il peut être judicieux de revoir l’équilibre entre les deux types de revenus.

Les professions libérales concernées (notamment médicales, juridiques, ou paramédicales) devront impérativement être accompagnées dans cette transition, car les erreurs de ventilation ou de déclaration pourraient coûter cher en redressement fiscal ou en régularisation URSSAF.

Professions libérales en SEL : la nouvelle imposition dès 2025

Avantages et inconvénients du nouveau régime

Derrière ce changement de cap fiscal, se dessine un nouveau rapport entre l’administration et les professions libérales en SEL. Certains y verront une opportunité, d’autres une contrainte. Voici les principaux bénéfices et limites à anticiper.

Les avantages

  • Déductions élargies : les charges déductibles en BNC sont plus nombreuses et souples que dans le cadre des traitements et salaires. Cela permet une meilleure adéquation entre dépenses professionnelles et revenu imposable.
  • Clarification des rôles : cette réforme impose une distinction claire entre les fonctions de gestion et les missions techniques. Une transparence utile en cas de contrôle fiscal.
  • Égalité de traitement : la nouvelle doctrine aligne les règles d’imposition sur celles des professions indépendantes en exercice individuel, créant une cohérence fiscale bienvenue.

Les inconvénients

  • Complexité accrue : devoir distinguer et comptabiliser séparément les deux types de rémunérations impose une rigueur administrative supplémentaire.
  • Risques d’erreurs : une mauvaise ventilation entre mandat et activité libérale peut entraîner redressement ou requalification.
  • Couverture sociale moins favorable : les revenus BNC offrent une protection sociale généralement plus faible que les salaires (notamment en cas d’arrêt maladie ou de maternité).
  • Remise en cause de certains montages : les stratégies d’optimisation basées sur la rémunération intégrale en traitements et salaires sont à reconsidérer.

En bref : un régime potentiellement plus favorable à ceux qui anticipent et optimisent, mais pénalisant pour ceux qui subissent la réforme sans accompagnement adapté.

Comment se préparer concrètement ?

Face à cette évolution réglementaire, les professions libérales doivent adapter leur organisation et leur mode de gestion. Voici les étapes concrètes à mettre en œuvre pour anticiper sereinement ce nouveau régime fiscal.

1. Identifier clairement vos fonctions

Commencez par distinguer, noir sur blanc, ce qui relève :

  • du mandat social (pilotage de la SEL, représentation, décisions stratégiques),
  • de l’activité libérale (prestations techniques, rendez-vous clients, suivi de dossiers).

Ce travail de clarification est fondamental pour justifier la ventilation des revenus.

2. Adapter votre comptabilité

  • Ouvrez une comptabilité distincte pour les revenus BNC (livre-journal, registre des immobilisations, etc.).
  • Choisissez entre le régime micro-BNC ou la déclaration contrôlée selon vos revenus.
  • Identifiez les charges déductibles (transport, cotisations sociales, frais professionnels…).

3. Déclarer correctement vos revenus

  • Pour les rémunérations de mandat : utilisez les cases habituelles de la déclaration 2042.
  • Pour les revenus libéraux :
    • micro-BNC : reportez les montants sur la déclaration 2042 C PRO,
    • déclaration contrôlée : remplissez la déclaration 2035.

L’administration recommande également de remplir un questionnaire spécifique à envoyer au service des impôts des entreprises (SIE). Ce formulaire vise à sécuriser la déclaration et anticiper les éventuels contrôles.

Accéder au questionnaire associé sur le site des impôts

4. S’entourer des bons interlocuteurs

Un accompagnement personnalisé est indispensable pour :

  • établir la bonne répartition des rémunérations,
  • anticiper l’impact fiscal et social,
  • optimiser vos choix de structuration.

Votre expert-comptable joue ici un rôle central pour sécuriser vos déclarations et aligner votre stratégie avec les nouvelles règles.

Ce qu’il faut retenir

La réforme du régime fiscal des associés de SEL à l’IS n’est pas un simple ajustement administratif : elle marque une évolution profonde dans la manière dont les professions libérales doivent structurer, comptabiliser et déclarer leurs revenus. La distinction entre mandat social et activité libérale devient la clé de voûte de toute stratégie fiscale efficace à partir des revenus 2024.

Mais cette réforme est aussi une opportunité : celle de mieux maîtriser ses charges, d’optimiser sa rémunération et de professionnaliser sa gestion. À condition d’être bien conseillé, au bon moment.

Vous êtes associé en SEL ? Nos experts Extencia vous aident à clarifier, déclarer et optimiser vos revenus selon le nouveau régime. Parlons-en ensemble.

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