La location de meublés touristiques connaît depuis plusieurs années un essor considérable en France, transformation accélérée par l’avènement des plateformes numériques facilitant la mise en relation entre propriétaires et voyageurs. Face à cette évolution et à ses impacts sur le marché immobilier, particulièrement dans les zones tendues, le législateur a souhaité renforcer l’encadrement de cette activité.
La loi du 19 novembre 2024 visant à renforcer les outils de régulation des meublés de tourisme à l’échelle locale, publiée au Journal officiel le 20 novembre 2024, introduit des modifications substantielles qui concernent directement les loueurs. L’une des mesures phares concerne l’uniformisation du processus déclaratif via l’instauration d’un téléservice national unique.
Un système d’enregistrement national uniformisé
De multiples systèmes locaux à une plateforme unique
Jusqu’à présent, les obligations déclaratives des loueurs de meublés touristiques variaient considérablement selon les communes. Certaines municipalités exigeaient une simple déclaration via un formulaire CERFA, tandis que d’autres avaient développé leurs propres plateformes numériques d’enregistrement. Cette hétérogénéité créait une complexité administrative tant pour les loueurs que pour les autorités de contrôle.
La loi du 19 novembre 2024 met fin à cette disparité en instaurant un téléservice national d’enregistrement. Comme le précise l’article 1er de la loi : “Toute personne qui offre à la location un meublé de tourisme procède préalablement en personne à une déclaration soumise à enregistrement auprès d’un téléservice national opéré par l’organisme public unique […]”.
Ce système centralisé représente une évolution significative qui facilitera la gestion administrative pour les loueurs intervenant sur plusieurs communes tout en garantissant une meilleure traçabilité des locations touristiques à l’échelle nationale.
Calendrier de mise en œuvre : mai 2026 au plus tard
Le texte législatif fixe une échéance claire pour l’implémentation de ce téléservice : “Le I, à l’exception du dernier alinéa du c du 1°, entre en vigueur à une date fixée par décret, et au plus tard le 20 mai 2026.“
Durant cette période transitoire, les loueurs devront continuer à se conformer aux réglementations locales existantes. Il est donc vivement recommandé de se rapprocher des services municipaux concernés pour connaître les modalités déclaratives actuellement en vigueur dans la commune où se situe le bien proposé à la location.

Nouvelles obligations documentaires pour les loueurs meublés
Justificatifs exigés lors de l’enregistrement
Le téléservice national exigera la production de plusieurs documents pour valider l’enregistrement d’un meublé de tourisme. Le texte mentionne explicitement “la production d’un avis d’imposition sur le revenu établi au nom du loueur incluant l’adresse du meublé de tourisme mis en location comme lieu d’imposition afin d’attester du respect de l’exigence prévue”.
Cette disposition vise notamment à vérifier si le logement constitue ou non la résidence principale du loueur, élément déterminant pour l’application de certaines règles spécifiques comme la limitation du nombre de jours de location annuelle.
D’autres documents pourront également être exigés :
- Pour les copropriétés : preuve de conformité avec le règlement de copropriété
- Pour les locataires souhaitant sous-louer : autorisation écrite du propriétaire
- Le cas échéant, autorisation de changement d’usage délivrée par la municipalité
Un décret d’application, actuellement en préparation, précisera de manière exhaustive la liste des pièces justificatives nécessaires.
Obligation d’information du syndic pour les copropriétaires
L’article 8 de la loi introduit une nouvelle obligation pour les copropriétaires : “Lorsqu’un lot de copropriété fait l’objet de la déclaration prévue à l’article L. 324-1-1 du code du tourisme, le copropriétaire ou, par son intermédiaire, le locataire qui y a été autorisé en informe le syndic.”
Cette disposition s’inscrit dans une volonté de transparence au sein des copropriétés, où l’activité de location touristique peut parfois générer des tensions entre résidents permanents et propriétaires-loueurs.
Régime des sanctions renforcé
Amendes administratives alourdies
Le non-respect des obligations déclaratives expose désormais les loueurs à des sanctions financières considérablement renforcées :
- Défaut d’enregistrement : amende administrative pouvant atteindre 10 000 € (contre 5 000 € précédemment)
- Fausse déclaration ou utilisation d’un faux numéro d’enregistrement : jusqu’à 20 000 € d’amende
- Dépassement du nombre de jours autorisés de location : amende civile de 15 000 € (contre 10 000 € auparavant)
Ces montants témoignent de la volonté du législateur d’assurer une application effective du cadre réglementaire.
Responsabilisation accrue des plateformes
Les plateformes de mise en relation entre loueurs et voyageurs (Airbnb, etc) voient également leurs obligations renforcées. Elles doivent désormais vérifier la présence d’un numéro d’enregistrement valide pour chaque annonce publiée et s’assurer que les logements proposés respectent les limitations de durée fixées par les communes.
En cas de manquement à ces obligations, les plateformes s’exposent elles aussi à des sanctions financières significatives et pourraient être contraintes de retirer les annonces non conformes.

Implications fiscales pour les loueurs
Nouvelles modalités d’abattement fiscal
La loi du 19 novembre 2024 modifie également le régime fiscal applicable aux revenus issus de la location meublée touristique. L’article 7 introduit une distinction claire entre différentes catégories de locations avec des taux d’abattement différenciés :
- 50% pour les biens classés et les chambres d’hôtes (avec un plafond de 77 700 € de revenus locatifs annuels)
- 30% pour les biens non classés (avec un plafond de 15 000 € de revenus locatifs annuels)
Ces nouvelles dispositions, qui s’appliqueront aux revenus perçus à partir du 1er janvier 2025, réduisent l’avantage fiscal précédemment accordé aux locations de meublés non classés, qui bénéficiaient auparavant d’un abattement de 50% au même titre que les locations classées.
Ce changement pourrait inciter davantage de propriétaires à entreprendre les démarches de classement de leurs meublés touristiques afin de conserver le bénéfice de l’abattement maximal.
Mesures spécifiques aux résidences principales
Limitation du nombre de jours de location
La loi renforce la capacité des communes à réguler la location touristique des résidences principales. Alors que la législation antérieure fixait uniformément à 120 jours par an la durée maximale pendant laquelle une résidence principale pouvait être louée en meublé touristique, l’article 4 de la nouvelle loi permet aux communes de réduire cette limite :
“La commune peut, sur délibération motivée, abaisser le nombre maximal de jours de location mentionné au premier alinéa du présent IV, dans la limite de quatre-vingt-dix jours.”
Cette mesure offre aux municipalités confrontées à des tensions sur leur marché locatif un levier supplémentaire pour maîtriser le développement des locations touristiques de courte durée.
Justification du statut de résidence principale
Le téléservice national exigera des preuves formelles attestant que le logement déclaré constitue bien la résidence principale du loueur, notamment via la production d’un avis d’imposition. Cette vérification systématique vise à lutter contre les fausses déclarations qui permettaient jusqu’alors à certains propriétaires de contourner les restrictions applicables aux résidences secondaires.
Diagnostic de performance énergétique (DPE)
Nouvelles exigences énergétiques
L’article 3 de la loi introduit progressivement des exigences de performance énergétique pour les meublés touristiques situés en zone tendue et soumis à autorisation de changement d’usage :
- Entre les classes A et E du 21 novembre 2024 au 31 décembre 2033
- Entre les classes A et D à compter du 1er janvier 2034
Ces dispositions s’inscrivent dans la continuité des mesures visant à améliorer la qualité du parc immobilier français et à réduire son impact environnemental.
Contrôles et sanctions
À partir du 1er janvier 2034, les maires pourront demander aux propriétaires de fournir le DPE valide de leurs meublés touristiques. L’absence de transmission du diagnostic pourra être sanctionnée par une astreinte administrative de 100 € par jour, tandis que la location d’un bien ne respectant pas les normes énergétiques requises exposera le propriétaire à une amende administrative pouvant atteindre 5 000 €.

Pouvoirs élargis des communes et des copropriétés
Nouvelles prérogatives municipales
La loi renforce considérablement les outils à disposition des communes pour réguler les locations touristiques :
- Possibilité de définir des quotas d’autorisations de meublés touristiques
- Faculté de réserver des secteurs dans le plan local d’urbanisme (PLU) aux résidences principales
- Capacité d’étendre les règlements de changement d’usage à tous les locaux non résidentiels
Ces dispositions répondent aux demandes des élus locaux qui souhaitaient disposer de moyens plus efficaces pour préserver l’équilibre entre habitat permanent et locations touristiques.
Évolution du cadre juridique des copropriétés
L’article 6 de la loi facilite l’encadrement des locations touristiques au sein des copropriétés :
- Les nouveaux règlements de copropriété devront mentionner explicitement l’autorisation ou l’interdiction de location de meublés touristiques
- La modification du règlement pour interdire les locations touristiques pourra désormais être adoptée à la majorité des deux tiers (contre l’unanimité auparavant)
Cette évolution représente un changement majeur qui pourrait conduire à l’interdiction des locations touristiques dans de nombreuses copropriétés où les résidents permanents sont majoritaires.
Conseils pratiques pour les loueurs
Mesures à prendre dès maintenant
En attendant la mise en place du téléservice national, les loueurs de meublés touristiques sont invités à:
- Se rapprocher de la mairie où se situe leur bien pour connaître les procédures déclaratives actuellement en vigueur
- Vérifier la conformité de leur activité avec le règlement de copropriété et informer leur syndic
- Anticiper les nouvelles exigences en rassemblant les documents qui seront nécessaires à l’enregistrement (avis d’imposition, diagnostics techniques, etc.)
- Suivre l’actualité réglementaire, notamment la publication du décret précisant la liste exhaustive des pièces justificatives requises
Veille réglementaire
La mise en œuvre complète de cette réforme s’étalera sur plusieurs mois, avec la publication attendue de décrets d’application qui préciseront certains aspects techniques du dispositif. Il est donc essentiel pour les loueurs de se tenir informés des évolutions réglementaires à venir.

Une réforme structurelle du secteur
La loi du 19 novembre 2024 marque un tournant dans la régulation des meublés touristiques en France. En uniformisant les obligations déclaratives, en renforçant les contrôles et les sanctions, et en élargissant les prérogatives des communes et des copropriétés, le législateur a souhaité apporter une réponse aux déséquilibres constatés sur le marché immobilier de nombreuses villes touristiques.
Pour les loueurs professionnels comme pour les particuliers qui proposent occasionnellement leur logement à la location, cette réforme implique une vigilance accrue quant au respect des obligations légales. La simplification administrative promise par le téléservice national unique s’accompagne en effet d’un renforcement des mécanismes de contrôle et de sanction qui rendra plus risquée toute activité non déclarée ou non conforme.
Dans ce contexte évolutif, il est plus que jamais recommandé aux loueurs de s’informer régulièrement sur leurs obligations et de s’assurer de la parfaite conformité de leur activité avec le cadre réglementaire en vigueur.
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FAQ : Questions fréquentes sur les nouvelles obligations des loueurs de meublés touristiques
Quand le téléservice national d’enregistrement sera-t-il opérationnel ?
Le téléservice national sera mis en place au plus tard le 20 mai 2026, conformément aux dispositions de la loi du 19 novembre 2024. La date précise de lancement sera fixée par décret. D’ici là, les loueurs doivent continuer à respecter les procédures déclaratives en vigueur dans leurs communes respectives.
Que faire si j’ai déjà un numéro d’enregistrement délivré par ma commune ?
Les numéros d’enregistrement actuellement délivrés par les communes resteront valables jusqu’à la mise en place effective du téléservice national. Une fois celui-ci opérationnel, une procédure de transition sera probablement mise en œuvre, dont les modalités seront précisées par décret. Il est recommandé de conserver tous les justificatifs relatifs à votre enregistrement actuel.
Quels documents seront nécessaires pour s’enregistrer sur le téléservice national ?
La loi mentionne explicitement l’avis d’imposition établi au nom du loueur incluant l’adresse du meublé comme pièce justificative obligatoire. D’autres documents seront vraisemblablement exigés : autorisation du propriétaire pour les locataires, accord de la copropriété, autorisation de changement d’usage le cas échéant, diagnostic de performance énergétique, etc. Un décret à paraître précisera exhaustivement la liste des pièces requises.
Comment savoir si mon logement est considéré comme une résidence principale au sens de la loi ?
Une résidence principale est définie comme le logement occupé au moins huit mois par an par le loueur ou son locataire, sauf obligation professionnelle, raison de santé ou cas de force majeure. C’est généralement l’adresse figurant sur votre avis d’imposition. Le téléservice national vérifiera ce statut via les justificatifs fournis.
Quelles sont les conséquences du non-respect de l’obligation d’enregistrement ?
Les sanctions ont été considérablement renforcées : amende administrative jusqu’à 10 000 € pour défaut d’enregistrement, jusqu’à 20 000 € pour fausse déclaration ou utilisation d’un faux numéro, et jusqu’à 15 000 € pour dépassement du nombre de jours autorisés de location. Par ailleurs, les plateformes seront tenues de retirer les annonces non conformes.
Ma copropriété peut-elle interdire la location touristique de mon appartement ?
Oui, la nouvelle loi facilite l’interdiction des locations touristiques en copropriété. Une modification du règlement de copropriété peut désormais être adoptée à la majorité des deux tiers (contre l’unanimité auparavant), sous réserve que le règlement interdise déjà toute activité commerciale dans les lots à usage d’habitation. Les nouveaux règlements de copropriété devront par ailleurs mentionner explicitement l’autorisation ou l’interdiction de location touristique.
Comment la limitation à 90 jours de location (au lieu de 120) sera-t-elle contrôlée ?
Les plateformes de location seront tenues de comptabiliser et transmettre aux autorités le nombre de nuits de location pour chaque logement. De plus, le téléservice national permettra une centralisation des données, facilitant le contrôle du respect de cette limite. Les communes auront également accès à ces informations.
Le nouveau régime fiscal s’applique-t-il immédiatement ?
Non, les nouvelles modalités d’abattement fiscal (50% pour les biens classés et chambres d’hôtes, 30% pour les biens non classés) s’appliqueront aux revenus perçus à partir du 1er janvier 2025. Pour l’imposition des revenus de 2024, le régime antérieur reste applicable.
Comment faire classer mon meublé touristique pour bénéficier de l’abattement fiscal de 50% ?
Le classement des meublés de tourisme s’effectue selon une procédure spécifique impliquant la visite d’un organisme accrédité qui évalue le logement selon une grille de critères (confort, équipements, services, etc.). La demande doit être adressée à Atout France ou à un organisme agréé. Le classement, valable 5 ans, comporte 5 catégories d’étoiles et permet, outre l’avantage fiscal, de rassurer les voyageurs sur la qualité du bien.
Que faire si ma commune n’a pas encore mis en place de procédure d’enregistrement ?
Dans l’attente du téléservice national, si votre commune n’a pas institué de procédure spécifique d’enregistrement, vous restez soumis à l’obligation de déclaration simple via le formulaire Cerfa n°14004*04, à déposer en mairie. Il est recommandé de contacter directement le service urbanisme ou tourisme de votre mairie pour confirmer les démarches à suivre.
Les exigences en matière de performance énergétique concernent-elles tous les meublés touristiques ?
Non, les exigences relatives au diagnostic de performance énergétique (DPE) ne concerneront que les logements situés en zone tendue et soumis à autorisation de changement d’usage. Les résidences principales louées occasionnellement et les biens situés dans des zones non tendues ne sont pas concernés par ces dispositions.